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PUTEAUX : LA DISPARITION PROGRAMMÉE DE 2.500 LOGEMENTS SOCIAUX


"A Puteaux, nous avons un tiers de logements sociaux. Notre objectif est de parvenir au taux de 20 pour cent que nous impose la loi". La phrase prononcée par Charles Ceccaldi, le 8 septembre 2003, lors d'une réunion publique sur le Plan Local d'Urbanisme (PLU), a bien failli passer inaperçue. Pourtant, plusieurs personnes dans l'assistance en comprennent immédiatement toute la signification...

Selon le dernier recensement de l'INSEE, en 1999, la ville de Puteaux compte un peu plus de 19.000 logements, dont 6.300 sont qualifiés de sociaux, soit 1 logement sur 3. Réduire cette proportion à 20% entraînerait la disparition immédiate de 2.500 logements !!!


Cette petite phrase prononcée devant un public trié n'est pas un lapsus. Il s'agit même d'un projet entamé par Charles Ceccaldi il y a déjà une quinzaine d'années...

A la fin des années 80, le marché de l'immobilier est au plus haut. Le maire, président de l'EPAD, est bien placé pour savoir que La Défense est en voie d'achèvement. Son ami le promoteur Christian Pellerin, patron de la puissante SARI, qui règne alors et pour quelques temps encore sur le quartier d'affaires, le sait aussi. Après les tours et les m2 de bureaux, l'avenir dans l'ouest parisien passera aussi par la construction de logements de "standings" pour loger les cadres des grandes entreprises de La Défense. Mais à Puteaux, vieille citée ouvrière, les terrains sont rares. Qu'à cela ne tienne, le maire en trouvera.

A cette époque, comme une sorte de répétition générale, 2 tours du quartier Bellini sont détruites : 200 logements HLM sont condamnés, officiellement pour construire un jardin. Ce dernier ne sera jamais réalisé. Mais la guerre du Golfe fera éclater la bulle immobilière d'alors et mettra un terme -pour quelques années- aux grands projets envisagés...

Charles Ceccaldi n'a pourtant pas toujours tenu ce discours. Lors de l'élection municipale de 1977, le maire menacé par l'union de la gauche, affirme dans son programme :

"L'identité de la ville sera respectée, son charme, son cachet, sa silhouette seront préservés. Si le temps des grandes opérations de rénovation est révolu, il importe par contre de réhabiliter et parfois de rénover dans les périmètres où la nécessité l'exige, mais alors, la rénovation doit obéir à des règles strictes : le programme doit faire au logement social la place qui lui revient, la rénovation doit être effectuée par l'intermédiaire d'un organisme public exclusivement, pas de place au capital privé, la réhabilitation doit avoir la priorité"...

Il faudra attendre le nouveau mandat de Charles Ceccaldi, en 2001, et la reprise du marché de l'immobilier (avec des fortes hausses équivalentes à celles des années 80), pour voir relancer le “grand projet” urbanistique de notre maire et de sa fille : faire de Puteaux un Neuilly-bis...
Dans le Projet Local d'Urbanisme, Charles Ceccaldi affirme qu'il faut "renforcer le caractère résidentiel de la ville", "répondre à la forte demande pour une accession à la propriété de grande qualité" et construire "des maisons de ville de type hôtels particuliers", tout en supprimant "le résiduel d'immeubles inconfortables ou insalubres".

Extraits du Projets Local d'Urbanisme distribué à tous les habitants de Puteaux :

- "Les habitations médiocres doivent être mises aux normes et souvent disparaître. Le temps est révolu où les investisseurs privés passaient à Puteaux sans s'arrêter (..) Le marché étant porteur, il faut exiger des façades de qualité, et un style architectural monumental" (page 17)

- "Tout doit contribuer à conférer à la ville ce caractère essentiel : grilles de style, squares, fontaines, réverbères, trottoirs. Les grilles sont un décor et une protection, c'est pourquoi elles sont critiquées par des partisans du laxisme" (page 17)

- "Le vieux Puteaux a été un ghetto. Aujourd'hui, certains le comparent au quartier du Marais à Paris. Le quartier ouvrier s'est transformé en quartier résidentiel..." (page 17)


Depuis 2001, aucun programme de logements sociaux n'a été lancé à Puteaux. Tous les projets envisagés avant la dernière élection municipale sont oubliés. Les contributions de la ville à l'office HLM sont réduites. Les réhabilitations des anciennes cités HLM ne font que rattraper le retard accumulé : des appartements sont encore sans salle de bain !



En revanche, la ville est livrée aux promoteurs privés. Une quinzaine de programmes de "standings" sont en cours de réalisation : le Clos des arts (rue de l'Oasis), la Villa Gauguin (rue Paul Bert), le Tiffany (rue des Pavillons), la villa Victor Hugo (rue Victor Hugo), la résidence Richard Wallace (boulevard Wallace), les Margeries (boulevard Wallace), le Domaine Lulli (quai Dion Bouton), la Villa Voltaire (rue Voltaire), les villas des Fontaines (boulevard Wallace), les Hausmanniens (rue de la République), etc, etc... L'ensemble de ces projets représentent plus de 500 nouveaux logements... à 4 ou 5.000 euros le m2 !!!

Si des rumeurs sur la destruction d'une des tours du quartier Lorilleux ont circulé... c'est plus par la disparition progressive des logements sociaux n’appartenant par à l’Office municipal et par la ghettoïsation des cités HLM existantes, que la diminution du taux de logements sociaux se fera assez rapidement à Puteaux. Chaque vieil immeuble détruit, occupé par des locataires modestes, sera remplacé par un immeuble de “standing”, avec des appartements de plus grandes surfaces, occupés par des familles moins nombreuses et surtout plus riches. La population de Puteaux diminuera (nous mesurerons l’ampleur de ce changement lors du prochain recensement) autant qu’elle progressera en richesse par foyer.

C'est une transformation sociologique forcée de Puteaux qui est en train de s'accomplir par la volonté idéologique et électoralement intéressée du maire. Une épuration sociale insupportable se joue devant nos yeux. Les populations modestes et moyennes de Puteaux ne sont-elles plus ici chez elles ?


Christophe Grébert - Janvier 2004


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